"Maître de mon destin, libre de mes soupirs, je ne rendais qu'à moi compte de mes désirs". Jean Racine, Bérénice, II, 2.
A l'adolescence je découvrais Simone de Beauvoir, pourtant ce n'est que quelques années plus tard, lors de mes études à la Sorbonne que je compris son message : "On ne naît pas femme, on le devient". Puis, j'ai longtemps été persuadée que toutes les femmes naissaient, comme moi, libres et égales en droits ou presque. Plus tard encore, la vie m'a mise face à une réalité : la femme est souvent livrée aux tourments de l'amour ainsi qu'à sa dictature, en se donnant corps et âme aux tyrans, sacrifiant cette précieuse liberté.
Quels statuts pour la femme au XXIème siècle ? Je n'ai pu passer, et vous non plus d'ailleurs, à côté de ces images dont regorgent les médias où certaines femmes se mettent à nue pour lutter contre les intégrismes... Je ne peux ignorer toutes ces victimes du "marché" du sexe dont les encarts dans les journaux ne cessent d'accroître les colonnes. Ni nier la place de la femme dans les guerres en tant que trophées. Est-il encore pensable qu'au XXIème siècle, les femmes soient toujours dans la rue dans le seul but de manifester pour des droits que l'on pensait acquis ? Jusqu'au droit de la femme à disposer de son propre corps comme elle l'entend, c'est-à-dire de faire de ce dernier un lieu de plaisir autant que de reproduction, droit qui ne lui est toujours pas acquis... Il est complètement dingue de penser que selon le lieu ou l'époque, le plaisir ou la maternité deviendront pour certaines fardeau, devoir ou interdit... Quand certaines auront à se battre encore pour un "châtiment" clément ! Quand j'y pense, j'ai mal à mes ancêtres !
Alors, chance ou malédiction d'être née avec un sexe de femme ? Communément appelé tantôt "le sexe faible" tantôt "le beau sexe", naître femme, c'est avoir une enfance biaisée, c'est grandir avec les attentes que les autres portent sur vous, avec les obligations de ce sexe, avec une dette de vie. Etre femme, c'est porter le fardeau de l'obligation de rendre la vie qui t'a été donnée, devenir mère à ton tour. La femme est enfermée dans ce rôle dès sa petite enfance. On te fait sentir qu'une de tes missions est de rendre la vie, procréer, tu es là pour ça... Donner la vie, une puissance qui donne beaucoup d'inquiétude à l'homme, ou plutôt, non... Il faut déplacer le problème, ce n'est pas complètement donner la vie qui fait peur à l'homme, c'est plutôt sa perte de contrôle face à l'appel du "sexe faible".
Le sexe de la femme, quand certaines l'expose, le décore, l'offre au tout venant ou le monnaye, il est chez d'autres une chose honnie, cachée, occultée, honteuse. Tout dépend de votre lieu de naissance, de votre éducation et parfois même de votre chance, de votre parcours ou destinée. Le sexe des femmes nourrit les peurs des hommes, et ce depuis toujours, bien qu'il leur procure plaisir et naissance. Il attise le désir autant que la haine. De nos jours encore il est triste de constater qu'il est tantôt exilé, maudit, conspué, tantôt consacré, mutilé autant qu'embrassé... Peu importe en fait, dans nos sociétés patriarcales il aura toujours quelque chose à se reprocher. Rapté, maltraité, violenté, forcé quand il se refuse, d'ailleurs ce non était-il bien un non ? Tout dépendra de la tenue vestimentaire de la coupable. Siège de l'honneur de toute une famille, grosse responsabilité pour une si petite chose ! Muselé chirurgicalement pour brider ou briser la liberté, au nom des coutumes. Mais pourtant loué par les poètes et croqué par les peintres, le sexe des femmes a dicté ses lois et ses désirs à l'histoire de l'humanité, d'ailleurs ne dit-on pas que "derrière chaque homme de pouvoir se cache une femme" ? Malgré tout, encore au XXIème siècle certains hommes, certains politiques ou certaines religions tentent de lui prescrire leurs volontés, leurs fantasmes, leurs interdits. Ceux-là même qui ont connus nos mères, et leurs mères avant elles, quels que soient les civilisations, les latitudes, les siècles.
Finalement, de mon point de vue, ce n'est pas du sexe de la femme dont l'homme à peur mais bien de sa propre faiblesse. Une faiblesse non assumée qui le rend vulnérable. Cette vulnérabilité devient vite à ses yeux perte de fierté, n'est pas homme celui qui perd le contrôle ! Il est des personnes, des castes, des genres qui malheureusement, pour masquer leurs faiblesses, écrasent les autres, pour retourner l'humiliation ou plutôt pour que le regard se détourne de leur propre faiblesse, de leur propre insuffisance. C'est un tour de passe passe mesquin, qui fonctionne mais dont personne n'est dupe. Un homme, s'il en est un, n'a pas besoin de rabaisser, de frapper, d'assujettir une femme s'il est vraiment homme. Parce que la femme l'aimera pour sa faiblesse et fera d'elle-même de cet homme, un Homme avec un grand H bien plus grand que celui qui est craint et qui réprime.
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